Est-ce que la construction, la réparation et l’entretien d’un chemin forestier sont assujettis au pouvoir de surveillance de la Commission de la construction du Québec et au décret de la construction?
Voilà une question qui saura en intéresser plusieurs.
Par contre, la réponse à cette question est un peu plus complexe et nécessite l’analyse de nombreux jugements qui ont été rendus en cette matière par la » Commission des relations du travail (Division de la construction et de la qualification professionnelle) » qui a remplacé ce qui était anciennement connu sous le vocable de » Commissaire de la construction « .
Il a été établi dans un premier temps que, pour être assujettie aux dispositions de la loi, la construction d’un chemin forestier doit répondre à la notion d’ouvrage de génie civil, notion sur laquelle on reviendra un peu plus loin.
Il ressort de l’analyse de la jurisprudence que les chemins forestiers de classe 4 et de classe 5, plus communément appelés » chemins de récolte « , ne sont pas aux yeux de la Commission des relations de travail des travaux de génie civil et conséquemment, échappent à l’application du décret de la construction.
Il ressort également de l’analyse des jugements rendus que les chemins de classe 2 et de classe 1 quant à eux, sont des ouvrages de génie civil et donc assujettis au pouvoir de surveillance de la Commission de la construction du Québec sous réserve des exemptions prévues dans la loi et dont il sera traité ci-après.
Les chemins de classe 3 quant à eux sont au coeur du débat jurisprudentiel, et la Commission des relations de travail a établi que, pour être considérés comme des ouvrages de génie civil, les travaux doivent :
- se rapporter à des biens immeubles;
- être exécutés pour une personne morale, publique ou, le cas échéant, pour une société industrielle privée, de grande envergure;
- être exécutés dans un but d’utilité générale.
C’est ce dernier point qui fait l’objet encore aujourd’hui d’une controverse, et le dernier jugement ayant été rendu par la Commission des relations de travail le 19 janvier 2009 a statué en regard du troisième critère, soit celui de l’utilité générale, que :
» Il faut considérer la finalité de l’ouvrage en regard de son usage ultérieur par la collectivité pour entrer dans le vocable d’ouvrage de génie civil … « .
Par cette décision à laquelle souscrit évidemment la Commission de la construction du Québec, on vient élargir la notion d’assujettissement pour les chemins de classe 3.
Par contre, si on en arrive à la conclusion que les travaux visés sont un ouvrage de génie civil, il est spécifiquement prévu à l’article 19.5 de la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main d’œuvre dans l’industrie de la construction, que ladite loi ne s’applique pas :
5 » aux travaux de construction qui se rattachent directement à l’exploitation de la forêt et qui sont exécutés par les salariés des entreprises d’exploitation forestière « .
Si vous êtes un entrepreneur forestier et que vous avez à exécuter des travaux de construction de chemins forestiers, lesdits travaux devront être exécutés par vos propres salariés, et ils devront être directement reliés à l’exploitation de l’entreprise forestière.
L’assujettissement des travaux de construction de chemins forestiers au décret de la construction peut avoir des conséquences extrêmement importantes pour l’entreprise visée. C’est pourquoi nous vous invitons à consulter un avocat en cas de doute, car la Commission de la construction du Québec a le pouvoir de réclamer pour l’exécution des travaux, l’application du taux prévu au décret de la construction, les indemnités qui y sont prévues tant à titre de prime d’éloignement qu’à titre d’heures supplémentaires, ainsi qu’une majoration de 20 %, et ce, rétroactivement.
Michel Lussier, avocat