Alain Provencher

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19 juillet 2010

ERREUR SUR LE MONTANT DE CAUTIONNEMENT, IRRÉGULARITÉ MINEURE OU MAJEURE, LA COUR D’APPEL SE PRONONCE

En matière d’octroi de contrat par voie d’appel d’offres, la Loi sur les cités et villes prévoit que le contrat doit être accordé au plus bas soumissionnaire.  Le principe de base est le droit des soumissionnaires d’être traités en toute égalité, en toute équité. Cette façon de faire protège non seulement l’intérêt public, mais également les soumissionnaires eux-mêmes qui sont assurés qu’aucun d’entre eux ne sera favorisé ou pénalisé.

D’un autre côté, lorsqu’une municipalité lance un appel d’offres, les soumissions déposées en réponse doivent également être conformes aux exigences de cette dernière, dans l’optique de ce droit à l’égalité.  Il doit donc notamment y avoir respect des délais, de la forme et des conditions de fond à travers le processus du dépôt de la soumission.  Or, jusqu’à quel point les autorités municipales peuvent-elles écarter une soumission plus basse, en raison de sa non-conformité?

C’est la question à laquelle ont dû répondre les juges de la Cour d’appel relativement à un appel d’offres de la Ville de Rimouski1 en mars dernier.  En effet, dans cette affaire, la soumission la plus basse comportait une irrégularité dans le cautionnement fourni en garantie.  Celui-ci représentait 10 % du prix de la soumission, alors que la Ville exigeait un cautionnement de 150 000 $.  Néanmoins, le montant remis accusait seulement un écart de 9 517 $.  Les professionnels responsables du projet, après avoir consulté les avocats de la Ville de Rimouski, ont retenu la deuxième soumission la plus basse.  Au niveau du coût,  la soumission était supérieure de pratiquement 45 000 $ à la première.

S’agissait-il d’une irrégularité mineure qui aurait pu être corrigée? Pour qu’une irrégularité soit considérée comme mineure,  » il ne faut pas que l’omission ou l’erreur commise ait un effet sur le prix de la soumission ou sur une exigence de fond contenue à l’appel d’offres.  »

La Cour d’appel en est venue à la conclusion que le fait de fournir un cautionnement inférieur de seulement 9 517 $ constituait un défaut mineur.  La Cour conclut que l’examen des impacts a démontré que l’irrégularité n’avait pas eu d’effet sur le montant de la soumission, que toutes les exigences de fond étaient respectées et que la garantie de 140 483 $ ne mettait pas en doute le sérieux du soumissionnaire.

Au surplus, la Ville soutenait que si l’irrégularité devait être considérée comme mineure par le Tribunal, elle devait pouvoir exercer son pouvoir discrétionnaire pour rejeter la soumission.  La Cour a rejeté cet argument en mentionnant que si la Ville, dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, avait décidé de faire preuve de rigidité à l’égard de toutes les irrégularités, elle aurait plutôt favorisé le quatrième soumissionnaire étant donné qu’il appert que des irrégularités mineures se sont glissées dans les soumissions du deuxième ainsi que du troisième soumissionnaire. La Ville avait pourtant fait preuve de souplesse, ce qui est contraire aux arguments qu’elle avance.

En plus de violer le principe fondamental de l’égalité des soumissionnaires, la Ville a ignoré l’intérêt de la collectivité en dépensant inutilement les fonds publics.  Dans cette affaire, la Ville a commis une faute en refusant au plus bas soumissionnaire l’opportunité de corriger son erreur, tandis qu’elle a accordé cette possibilité aux autres.

En conclusion, rappelons seulement que les municipalités disposent d’un pouvoir discrétionnaire qu’elles peuvent exercer de bonne foi en regard de soumissions présentant des irrégularités mineures.  Celui-ci doit cependant s’exercer de façon à respecter, d’une part, l’égalité des soumissionnaires, mais également, d’autre part, dans le meilleur intérêt des contribuables et en conformité avec la Loi sur les cités et villes.

En cas de doute, il est toujours préférable de consulter un avocat.

Alain Provencher, avocat
En collaboration avec Marie-Ève Gagné, étudiante en droit


1 Rimouski (ville de)  c.  Structure GB ltée (8 février 2010) Québec (C.A.)

© Simard Boivin Lemieux, 2014. Tous droits réservés.

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