Nombreuses sont les ventes d’immeubles qui interviennent par l’intermédiaire d’un courtier immobilier. Ses services sont requis soit par l’acheteur, soit par le vendeur ; il a pour rôle d’agir d’une part, comme un conseiller pour l’établissement du prix et des conditions de vente et, d’autre part, comme facilitateur pour la réalisation d’une transaction. Lorsque ses services sont requis par le vendeur, le courtier immobilier recueille de celui-ci les informations relatives à sa propriété et les collige sur la fiche descriptive qu’il remettra aux acheteurs potentiels.
Dans le cadre de la préparation de cette fiche descriptive, le courtier immobilier doit apporter un soin particulier quant à la précision des informations contenues, car toute erreur (omission ou divergence) pourrait lui être imputable dans l’hypothèse où, éventuellement, un vice ou une non-conformité affecterait l’immeuble et que la fiche descriptive aurait trompé l’acheteur à l’égard de ce vice ou de cette non-conformité.
Dans la cause Noreska c. Martel1, le tribunal a analysé la responsabilité d’un courtier immobilier qui avait agi à titre d’agent inscripteur et qui avait indiqué dans la fiche descriptive que l’immeuble à vendre permettait de louer des logis. Or, dans les faits, l’immeuble comprenant des chambres locatives était en contravention de la réglementation municipale destinée à ce secteur résidentiel. Le courtier était informé de cette situation d’interdiction de logement locatif puisqu’il avait lui-même un immeuble dans ce secteur résidentiel. Selon sa connaissance, la Municipalité tolérait toutefois la location d’appartements et de chambres. Dans ce cas, le vendeur avait reçu des avis de non-conformité en relation avec les chambres qu’il louait et il ne l’avait pas dénoncé au courtier ni à l’acheteur.
Conséquemment, l’immeuble fut vendu, et l’acheteur qui s’en est porté acquéreur avait comme intention de le transformer entièrement en immeuble à revenus. Après la vente, il a réalisé rapidement que cela lui était impossible en vertu de la réglementation applicable à ce secteur.
Dans l’appréciation de la responsabilité du courtier immobilier face à une telle situation, on doit considérer les règles de déontologie de l’Association des courtiers et agents immobiliers du Québec (article 11), qui prévoient pour le courtier l’obligation légale de vérifier l’exactitude des renseignements qu’il fournit au sujet de l’immeuble pour lequel il a un mandat de vente.
Dans la présente cause, le tribunal a considéré que le courtier avait manqué à son obligation de renseignements et de conseils en indiquant une information fausse sur la fiche descriptive et en ne procédant pas aux vérifications nécessaires qui lui auraient permis d’apprendre que la propriétaire avait reçu des avis de non-conformité, ce qui constituait une information essentielle pour les acheteurs potentiels. L’acheteur, dans le présent cas, pouvait raisonnablement croire en lisant la fiche descriptive à la légalité des logis, d’autant plus que cette fiche indiquait des revenus locatifs intéressants.
En considération de cette faute, le courtier fut condamné à indemniser le demandeur pour les dommages que cette erreur lui a causés .
Il faut comprendre de cette décision que le courtier immobilier a une responsabilité tant à l’égard du vendeur qu’à l’égard de l’acheteur. Il a l’obligation de vérifier par des moyens raisonnables l’exactitude du contenu de la fiche descriptive qu’il remplit avec l’aide du vendeur et qu’il remet à l’acheteur. De notre avis, deux précautions devraient guider le courtier dans l’exécution de son mandat de vendre un immeuble. D’une part, le courtier devrait réviser la fiche descriptive avec le vendeur avant de la publier et s’assurer de la véracité de son contenu (en lui posant les questions appropriées et en vérifiant les usages permis auprès des autorités compétentes). D’autre part, le courtier immobilier devrait prévoir, préalablement à l’offre, au moins une rencontre entre l’acheteur et le vendeur afin qu’ils s’échangent en personne, les informations additionnelles et utiles concernant l’état de l’immeuble et afin d’éviter ainsi que le courtier n’assume quelque représentation que ce soit relativement à cet état. Même si la vente de l’immeuble est la finalité ultime du mandat donné au courtier immobilier, une démarche transparente et complète entre acheteur et vendeur peut éviter bien des désagréments.
Marie-Claude Gagnon, avocate
1 Noreska c. Martel, CanLII – 2011 QCCS 5107