Les entrepreneurs et les employeurs doivent, une fois de plus, composer avec une nouvelle exigence dans le cadre de leurs relations d’affaires. L’interprétation de la jurisprudence et des orientations mêmes de la CSST par rapport à l’article 316 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles élargit son pouvoir de réclamer à l’entrepreneur ou à l’employeur désigné comme « principal », la cotisation due à la CSST pour un cocontractant. L’article 316 se lit comme suit :
« La Commission peut exiger de l’employeur qui retient les services d’un entrepreneur le paiement de la cotisation due par cet entrepreneur.
Dans ce cas, la Commission peut établir le montant de cette cotisation d’après la proportion du prix convenu pour les travaux qui correspond au coût de la main-d’œuvre, plutôt que d’après les salaires indiqués dans la déclaration faite suivant l’article 291.
L’employeur qui a payé le montant de cette cotisation a droit d’être remboursé par l’entrepreneur concerné, et il peut retenir le montant dû sur les sommes qu’il lui doit.
Lorsqu’un employeur démontre qu’il retient les services d’un entrepreneur, la Commission peut lui indiquer si une cotisation est due par cet entrepreneur ».
Si vous êtes une entreprise et même pour certains cas un « particulier » qui s’engage avec une autre entreprise pour un contrat de quelque nature que ce soit, vous êtes tenus responsables de la cotisation due par l’entrepreneur avec qui vous avez fait affaire. Vous serez alors réputés être des employeurs quant à l’application de cet article.
Un employeur désigne « une personne qui, en vertu d’un contrat de travail ou d’un contrat d’apprentissage, utilise les services d’un travailleur aux fins de l’exploitation de son établissement ». Cette définition a reçu une interprétation très large et semble, à ce jour, vouloir imposer aux gens d’affaires une responsabilité à l’égard des donneurs d’ouvrage quant aux versements de la cotisation due par des sous-traitants.
Il existe présentement sur le site internet de la CSST deux formulaires. Le premier est une demande d’information sur l’état de conformité pour permettre à l’employeur qui retient les services d’un entrepreneur d’être informé, en cours de contrat, que ce dernier est conforme ou non quant à sa cotisation due à la CSST. La deuxième demande d’attestation de conformité est pour permettre à l’employeur d’obtenir, lorsqu’un contrat est terminé, la confirmation que l’entrepreneur a versé sa cotisation due à la CSST, le dégageant ainsi de sa responsabilité envers cette cotisation. L’oubli de faire une vérification auprès de la CSST (et non pas seulement auprès de l’entreprise), quant à sa conformité, peut avoir des conséquences très onéreuses puisque même si vous ne faites plus affaire avec l’entrepreneur ou que l’entrepreneur est dans une mauvaise situation financière ou en faillite, vous serez responsable de la cotisation due par ce dernier, et ce, peu importe le délai ou le temps qui s’est écoulé. Au surplus, la cotisation qui est faite à l’entrepreneur que l’on nomme « transfert de l’entrepreneur », se veut non pas sur le salaire, mais sur le coût de la main-d’œuvre. D’ailleurs, dans une décision récente de 2011 (QCCLP2835), il a été décidé que « la CSST doit se référer non pas à la déclaration des salaires faite par l’entreprise, mais selon une certaine proportion qui tient compte du coût de la main-d’œuvre.[…] Une telle méthode permet d’établir avec plus de représentativité la portion de cotisation que devrait acquitter l’employeur et a pour avantage de faire en sorte que la proportion ainsi obtenue reflète la part des salaires imputables pour les travaux confiés et effectués par l’entreprise pour le compte de l’employeur ».
Les entrepreneurs s’exposent donc à payer des réclamations de la CSST au lieu et place de leur sous-traitant ou contractant; c’est pourquoi les entrepreneurs doivent redoubler de vigilance et s’assurer qu’ils ont agi avec diligence en faisant les vérifications directement auprès de la CSST.
La révision d’une décision de la CSST est possible dans un délai de trente jours où cette décision a été rendue, le tout conformément à la Loi. Ce délai n’est pas un délai de rigueur, et la Loi permet la prolongation, et ce, pour un motif raisonnable.
Si vous avez des questions ou des réclamations pour ce genre de situation, n’hésitez pas à communiquer avec un spécialiste de la société d’avocats Simard Boivin Lemieux.
Isabelle Boillat, avocate