Depuis le début des années 1980, la Loi sur la santé et la sécurité du travail (« la Loi ») prévoit des dispositions spécifiques pour les travailleuses enceintes ou qui allaitent. Ces dispositions permettent à ces travailleuses de demander à leur employeur d’être affectées à des tâches ne comportant pas de dangers physiques et en mesure d’être accomplies raisonnablement.
Bien entendu, pour se prévaloir de ce droit, encore faut-il que les conditions de leur travail habituel comportent des dangers physiques pour elles-mêmes et pour leur enfant à naître ou pour l’enfant qu’elles allaitent. C’est donc à tort que, dans le vocabulaire courant, l’on se réfère à l’expression « retrait préventif », puisqu’en réalité, il s’agit d’abord d’une réassignation préventive.
Pour se prévaloir de ces dispositions, la travailleuse enceinte ou qui allaite doit présenter à son employeur un certificat médical selon la forme prescrite et attestant que son travail présente un danger physique; après quoi, la travailleuse peut demander d’être réaffectée à des tâches ne comportant pas de tels dangers physiques. S’il est impossible de le faire, alors la travailleuse pourra cesser de travailler et percevoir des indemnités de remplacement de revenu. Ce sera donc à partir de ce moment que l’on parlera d’un véritable « retrait préventif ».
En cas de retrait préventif, la travailleuse aura toutefois l’obligation de demeurer disponible tout au long de cette période afin qu’elle soit affectée à de nouvelles tâches conformes au certificat médical, lorsque cela est possible. En effet, tout au long de la période de retrait préventif, l’employeur peut proposer une affectation à la travailleuse. Si celle-ci refuse cette affectation proposée par l’employeur pour des raisons de non-disponibilité, elle s’expose alors à la perte de son droit au retrait préventif et, par conséquent, à la perte de ses indemnités de remplacement de revenu.
Il est possible pour l’employeur qui est en désaccord avec le certificat médical remis par la travailleuse de le contester. La Loi ne prévoyant aucun mécanisme, l’employeur pourra simplement refuser la demande d’affectation de la travailleuse; cette dernière aura alors l’obligation de s’adresser à la CSST afin qu’elle statue sur sa demande.
À partir du moment où le droit au retrait préventif est reconnu à la travailleuse, elle pourra percevoir une indemnité de remplacement de revenu qui sera supportée par l’ensemble des employeurs et non pas uniquement par son employeur. L’indemnité de remplacement de revenu ainsi perçue par la travailleuse sera la même que celle perçue si elle avait été victime d’une lésion professionnelle.
Lorsque l’une des parties est en désaccord avec une décision rendue par la CSST concernant le retrait préventif, elle peut se prévaloir d’une procédure accélérée de contestation et demander la révision de cette décision dans les dix jours suivant sa notification. Si la partie est toujours en désaccord avec la décision de révision administrative, elle peut en saisir la Commission des lésions professionnelles dans un délai de dix jours suivant sa notification. La CLP analysera alors si les conditions décrites au certificat médical ont été respectées par l’employeur.
La perception d’une indemnité de remplacement de revenu cessera si l’employeur est en mesure d’affecter la travailleuse à des tâches conformes au certificat médical; sinon elle cessera à la quatrième semaine précédant la date de l’accouchement. Dans le cas de la travailleuse qui allaite, le droit à l’indemnité de remplacement de revenu cessera à la fin de l’allaitement, si l’employeur n’a pas été en mesure de réaffecter la travailleuse.
Joël Brassard-Morissette, avocat