Isabelle Simard

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1 février 2009

UN DÉLAI DE PAIX

Le défaut de paiement ou d’exécution d’une obligation contractée dans le cadre d’un prêt hypothécaire permet à l’institution financière d’exercer des recours en recouvrement, y compris le droit de demander le délaissement du bien donné en garantie aux fins de vente ou de prise en paiement. Dans ce dernier cas, l’institution doit acheminer un préavis à l’emprunteur qui bénéficie d’un délai de 60 jours (pour un immeuble) afin de remédier à son défaut.

Quels sont les droits et les obligations de l’institution financière pendant cette période? Dans un jugement important rendu en juin dernier1 , la Cour supérieure a considéré que la Banque et son gestionnaire d’immeubles avaient agi de façon inappropriée dans des circonstances dignes d’une saga.

En résumé, les emprunteurs étaient en défaut, et la Banque tentait depuis longtemps de les contacter, sans succès. Avant l’expiration du délai de 60 jours du préavis donné aux emprunteurs, la Banque a engagé une firme gestionnaire pour examiner l’état des lieux. Si l’un des condos était vide, l’autre montrait par ailleurs une habitation récente malgré l’absence de quiconque sur les lieux. Convaincue que les lieux étaient effectivement abandonnés, la Banque confia le mandat au gestionnaire de pénétrer dans l’immeuble, de prendre des photos, de changer les serrures et de sécuriser l’entrée de la propriété.

Quelques jours plus tard, la famille, qui revenait d’un voyage, retrouva sa maison barricadée et dut avoir recours à la police pour pouvoir réintégrer sa résidence.

Selon la Cour, le silence d’un emprunteur à la suite de la réception d’un tel préavis ne constitue pas une preuve de l’intention de l’emprunteur de délaisser l’immeuble. Pendant cette période de 60 jours, conclut le tribunal, le débiteur a droit à la paix. La Cour énonce que si l’institution financière n’a aucune raison de croire que les biens faisant l’objet de sa garantie sont à risque, abandonnés ou nécessitent une surveillance, elle ne peut exécuter cette surveillance pendant ce délai même si, aux termes du contrat hypothécaire, elle a le droit d’inspecter la propriété et de se rendre sur les lieux pour en vérifier l’état.

La Cour a aussi conclu que, dans les circonstances, la Banque aurait dû demander une ordonnance afin d’inspecter la propriété; elle a condamné cette dernière et le gestionnaire à payer des dommages aux emprunteurs.

Il peut survenir des situations qui justifient l’institution financière d’intervenir afin de protéger l’immeuble et la valeur du bien donné en garantie. Dans tous les cas, l’institution se doit par ailleurs d’agir avec prudence, diligence et loyauté envers son client. Malgré ce délai de paix, il est toujours plus prudent dans un tel cas pour l’emprunteur de contacter son institution financière pour la rassurer sur l’occupation du bien… Il est aussi prudent de consulter un avocat qui pourra aider à évaluer les droits du créancier ou du débiteur et lui proposer la stratégie légale adéquate.

Isabelle Simard, avocate

© Simard Boivin Lemieux, 2014. Tous droits réservés.

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